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dimanche 1 décembre 2013

La sélection de Noel 2013: le livre pour Papa/Maman, tonton... Astérios Polyp de David Mazzuccheli



Asterios Polyp est un professeur d'architecture. Il est doué, rationnel et a une grande faculté, il retient très vite ce qu'il lit. Seul, le jour de son 50eme anniversaire, dans son appartement, celui-ci prend feu suite à un orage. Contraint de le quitter, Asterios décide alors de s'en aller là où son argent en poche pourra l'emmener et de changer de vie. Le professeur trouvera au terminus de son voyage un garage automobile. Ici commence sa nouvelle vie...





L'album

Asterios Polyp de David Mazzuccheli narre la nouvelle vie de ce professeur d'architecture divorcé de 50ans. Le livre commence à l'incendie de son appartement et se succède énormément de flash-back et de rêves permettant le changement de chapitres.
Le caractère des dialogues change selon la personne ; Asterios a un caractère assez gros, la bulle est bien carré, on sent ce coté sûr et imposant. Au contraire, une femme un peu réservée aura une bulle très ronde, au petit caractère. Asterios Polyp fonctionne avec de nombreuses formes et de couleurs. Un personnage qui s'énerve passera tout de suite dans un dessin brouillon et une couleur rouge vif. Les flash-back eux, seront dans un bleu clair, tandis que le présent sera jaune.





En avis personnel, ce roman graphique sort grandement du lot, pas de super-vilains ni de pouvoirs, on rentre là dans un livre de la vie et de la philosophie humaine. Les regrets, le mariage, l'égoïsme, le bonheur, le travail, la jalousie, la religion,... tous ces facteurs sont mis en avant et c'est ce qui rend ce livre si véridique. Mazzuccheli a vraiment usé de ses plus grands talents pour ce réel chef d'oeuvre. On voit vite au travers de flash-back qu'Asterios va réaliser combien Hana, son ex-femme comptait pour lui ; et c'est ce qui touche le lecteur. On est envoûté par ce scénario étonnement poignant !

La première question est comment appréhender correctement ce livre considéré par Apo(K) Lyps comme le meilleur comic-book de la décennie ?
C'est définitivement une œuvre d'une intelligence littéraire remarquable, pleine de symbolisme et d'allusions, mise en forme de façon exceptionnelle pour aboutir à une histoire fascinante.
L'objet est en soi intimidant et l'on se demande comment rendre compte clairement et simplement de sa richesse, sans pour autant le décrire comme un livre élitiste, réservé à des initiés.


Avec son format unique, son absence de numérotation de pages, son jeu complexe de couleurs, son encrage violet et non noir, ainsi que son propos original et littéraire, l'album ressemble à une ardente comète. Il en a le panache, la brillance et la fulgurance. En réalité, rien n'avait préparé les inconditionnels de l'américain David Mazzucchelli à cet ouvrage innovant au graphisme audacieux, étrangement intitulé. On avait certes noté le séduisant graphisme du bonhomme, associé à une belle virtuosité, notamment dans Batman Year One . Son adaptation des romans new-yorkais de Paul Auster montrait également une sorte de légèreté, de facilité nouvelle, acquise en se détachant des codes par trop pesants des comics books. Mais en ressortant le nez d'Asterios Polyp, on ne peut s'empêcher de se dire qu'on vient de lire une grande bande dessinée.

L'histoire ? Elle met en scène un personnage au nom bizarre Asterios Polyp. Architecte brillant, théoricien universitaire adulé par ses étudiantes, mais n'ayant jamais rien construit de sa vie, ce personnage un brin misanthrope, solitaire et fier de l'être, va tomber amoureux d'Hana, sa moitié d'orange, la femme de sa vie. L'album débute au moment où le héros s'étiole après leur séparation.

Tant par la (dé)construction de son récit que par la transcription en images des intentions de l'auteur et des états d'âme des personnages, Asterios Polyp ne cesse de repousser les frontières du medium. Pas d'encre noire, mais des traits mauves, plus doux. Pas de couleurs franches, mais des aplats tramés à la signification changeante. Si l'architecte Polyp est fan de lignes droites, le récit quant à lui, joue les filles de l'air et les courbes féminines plus charmantes que jamais. En un mot comme en cent, cette biographie rêvée, dans laquelle le récit joue des flashbacks pour révéler par petites touches, bribes de souvenirs, le parcours chaotique d'Asterios. 
 Un chef d'oeuvre tout simplement.

Cette histoire semble fort banale, mais c'est son exécution qui transforme ce comic-book en une oeuvre totalement exceptionnelle.
Mazzucchelli va en effet employer tout son art, déployer toute son imagination, user de toute une palette d'astuces visuelles et narratives pour relater cette intrigue et en faire une bande dessinée atypique et sensationnelle, à la fois drôle et poignante, profonde et légère. Une histoire qui ne pouvait littéralement être racontée que sous cette forme-là, celle des comics, qui est à la fois exigeante et exaltante, une expérience unique.

En termes purement narratif, l'effort de David Mazzucchelli ici n'a rien de vraiment spécial dans un premier temps : son propos peut être assimilé à celui de bien des films d'auteur indépendants, comme ces "road movies" où le héros, à la fois riche et désemparé, traverse le pays et durant son voyage va tirer un certain nombre d'enseignements sur lui-même, la vie, l'amour, etc. Tous ces ingrédients sont présents dans Asterios Polyp, mais c'est le propre des grands auteurs que de s'emparer de tels clichés pour créer une production qui les transcende.



L'auteur

Né en 1960 à Providence (Rhode Island) aux Etats-Unis, David Mazzucchelli est surtout connu pour être un dessinateur de comic books intelligents, et notamment Batman Year One (pour DC) ou les aventures de Daredevil (Marvel) sur des scénarios de Frank Miller. Son trait noir et blanc, puissant et souple, fait merveille. Pourtant, Mazzucchelli prend progressivement ses distances avec l'univers manichéen des super héros. Il illustre notamment la trilogie de Paul Auster Cité de Verre, en 1994 ou son propre comic-book Rubber Blanket. Asterios Polyp est son premier roman graphique, paru Outre-Atlantique en 2009. 

Rare sont les titres qui obtiennent 9/10 et Astérios mérite un 9.75/10

Prix spécial du jury 2011 du Festival d’Angoulême : Asterios Polyp (Casterman), par David Mazzucchelli.

Disponible en français et en anglais.

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